- Origine et évolution du nom de Groslay
- Groslay : un peu d'histoire
- L'Eglise de Groslay
- L'Armistice de la première Guerre mondiale
- La Tribune Samedi 9 juin 1917 Groslay - Avant la famine
- La Tribune - Samedi 23 mars 1918 Groslay
- La Tribune - Samedi 4 mai 1918 Groslay
- La dernière semaine d'Août 1944 au Pavé d'Enfer
- Le Château Vieux 25, rue de Montmorency
- Lieux-Dits et Sobriquets
- Une maison disparue : Comartin ou chez les demoiselles Rambaud
Origine et évolution du nom de Groslay
Le Cartulaire général de Paris cite un Philippe de Groolé de 1177. Dans un autre document de la même année il est parlé de Philippe de... Grooloi.
En 1185 le toponyme donne Groolei.
On trouve encore Grolei et Grolet vers 1190 ; Groolai en 1214 ; Grolay en 1229, dans une charte de Mathieu de Montmorency ; Grollée en 1275 ; Groloi en 1293 ; Groolay en 1299.
En 1524 on écrit Grollai, Grollay et Grolay dans l'état des Redevances à la Collégiale de Montmorency.
La graphie Groslay se rencontre souvent dans les registres paroissiaux du XVIIe siècle ; on emploie même cette dernière forme, que l'on croirait récente, dans une charte de Guillaume de Montmorency, signée en 1490, comme déjà, en 1378, dans le diplôme des Privilèges accordés par le roi Charles V à notre village.
Ainsi il y a eu très peu de changement dans la prononciation du nom de Groslay, en langue vulgaire, depuis une quinzaine de siècles.
Quant au Graulidum ou Grauelidum du IXe siècle, il n'est lui-même qu'une traduction, moins logique que Groeletum si on le rapproche du mot groele, plus savante si l'on considère la racine même de ce dernier terme qui serait, d'après M. Dauzat, le graua de l'ancien gaulois, racine également du dialectal groue, mot bien connu des paysans.
L'Abbé Pacaud et Jean Aubert
Description héraldique du Blason de Groslay :
“Écartelé, au premier, de l'Abbaye de Saint-Denis ; aux deuxième et troisième, d'or à quatre alérions d'azur, cantonnés ; au quatrième, de Bourbon-Condé, et, sur le tout, de gueules à la grappe de raisin d'or accompagnée en chef d'un soleil du même et, en pointe, d'une rivière d'argent en fasce”
Cette “rivière” rappelle le ru d'Arras, près duquel se forma le premier centre de Groslay.
Groslay : un peu d'histoire
Si aucune preuve du passage de l'Homme n'a été découverte à Groslay dans les temps les plus reculés, il est certain qu'il y a 5 000 ans, l'homme foulait de son pied notre territoire communal.
Ces hommes du néolithique ont laissé plusieurs traces dans les environs : pierres plantées au beau milieu des champs, allées couvertes en forêt de Montmorency, emplacements où se situait le tannage des peaux, prouvent bien que la vie existait déjà proche de Groslay.
Rien non plus n'atteste la présence de l'homme sur notre commune avant l'invasion romaine il y a plus de 2 000 ans, pourtant de petites agglomérations avaient déjà vu le jour à Saint Brice et à Deuil-la-Barre où furent découvertes quelques sépultures près du lac Marchais qui était un lieu vénéré par les Gaulois qui le nommaient " Mercasii ".
L'époque gallo-romaine ne nous informe toujours pas d'un éventuel habitat, pourtant, certains secteurs de notre commune bien situés, possédant une bonne terre (les Hérondeaux, le secteur des Haras, le coteau au nord de Groslay) ont dû intéresser les agriculteurs de l'époque, mais là encore nulle trace de villa romaine qui était souvent construite sur une petite proéminence. C'est sans doute à cette époque que débuta la culture de la vigne, plante qu'introduisirent les Romains.
Pourtant, c'est une certitude, la vie existait sur notre territoire, donc attendons un peu et soyons vigilants, peut-être au hasard de travaux de terrassement, ferons-nous une découverte intéressante ?
Les seuls vestiges datant de cette époque ont été retrouvés sur le territoire de Deuil-la-Barre près des " Mortefontaines ", il s'agissait de thermes et d'un aqueduc.
Nous savons aussi que dès le début de ce millénaire existait une chaussée aménagée, partant de Lutèce (Paris), et allant à Beauvais, cette route fut par la suite appelée chaussée Brunehaut (Reine d'Austrasie entre le 6ème et 7ème siècles après JC).
En l'an 500, Groslay comme toute l'Ile de France passe sous la protection de Clovis et de ses soldats Francs. Notre commune entre ainsi dans le domaine royal, tout comme Deuil-la-Barre à laquelle les quelques maisons formant Groslay sont rattachées.
L'époque Mérovingienne entre le 5ème et le 7ème siècles est un peu plus féconde, car lors de transformations réalisées dans notre église, il fut mis à jour dans le sous-sol quelques sarcophages. C'est aussi vers l'an 630 que le roi cède le fief de Deuil-la-Barre (donc Groslay également) à l'abbaye de Saint Denis. Les paysans jusqu'alors protégés par le roi vont voir leurs conditions se dégrader.
Il fallut attendre le 13ème siècle pour voir surgir de terre une église digne de ce nom. Même si la construction fut remaniée au fil des siècles (vers 1230, un clocher, une nef, au 16ème siècle, de 1520 à 1542, prolongation du chœur et construction des collatéraux, milieu 18ème, construction du porche, fin 19ème construction de la sacristie), notre église peut s'enorgueillir d'être le plus vieux monument de Groslay.
En 911, le Roi de France cède la province qui allait s'appeler la Normandie aux Normands qui, jusqu'alors semaient la terreur dans bon nombre de régions qu'ils pouvaient approcher par voie fluviale.
Le pays était enfin en paix.
En 978, la population groslaysienne eut à subir l'invasion des troupes de l'Empereur germanique Othon qui s'empare de la colline de Montmorency et y établit son camp avec 40 000 hommes. Nos braves paysans sont pillés et massacrés.
Au 12ème siècle la population était alors d'environ 240 personnes et dépendait du Seigneur Guy de Groslay et de son épouse Dame Richilde qui sut si bien administrer ses terres après le décès de son époux. Elle fut d'un grand secours pour les groslaysiens, car elle n'eut de cesse d'améliorer leur condition. Tous deux étaient vassaux de la seigneurie de Montmorency.
Le Moyen-âge s'écoula comme dans tous les villages de cette époque, la vie était rude, la nourriture peu abondante, l'impôt ne laissait quasiment rien aux pauvres gens et de plus les épidémies décimaient la population.
Mais le plus grand fléau ne s'était pas encore abattu sur notre contrée. Il arriva entre le 14ème et le 15ème siècles avec la guerre de cent ans. Quand celle-ci commença, Groslay comptait 350 âmes, un peu plus d'un siècle après, avec cette guerre, les révoltes paysannes (jacqueries), la famine, les loups, la peste noire, les brigands et mercenaires, notre commune ne comptait plus que … 50 habitants. Toutes les plus vieilles familles avaient disparu. Un arrêté royal fut pris afin de repeupler Groslay, moyennant quelques avantages aux personnes qui viendraient s'installer dans ce village à l'abandon.
C'est ainsi qu'émigrèrent à Groslay de pauvres gens venant à pied de leurs lointaines provinces : la Bourgogne et la Champagne.
Tous les noms des plus anciennes familles de Groslay qui ont subsisté jusqu'à nos jours sont issus de ces rudes travailleurs. Groslay se repeupla rapidement pour atteindre au 16ème siècle 540 habitants, le travail ne manquait pas et la production de vin allait croissant. C'est au cours de ce siècle que furent posés les plus anciens vitraux de notre église que vous pouvez toujours admirer.
Le 17ème siècle vit de terribles maux surgir à nouveau, les soldats de Louis XIV n'étant plus payés se révoltèrent et se livrèrent au pillage des villages, Groslay connut encore des heures sombres. Le calme revenu, la population de notre commune s'éleva à 800 habitants. Puis, vint la révolution, le fermier général Danger de Bagneux habitant en son château à Groslay devait être un brave homme, mais il fut tout de même arrêté, condamné à la guillotine sur de fausses accusations d'un de ses ennemis. Ses biens furent confisqués, mais des voix s'élevèrent et les juges estimèrent avoir été un peu vite en besogne et reconnaissant leur erreur firent en sorte que la famille du malheureux puisse retrouver ses biens.
La révolution voulant effacer les traces de la monarchie décida de représenter le blason de notre commune : une tête de sanglier ainsi qu'un pied de vigne. C'est ce blason qui représente toujours nos armes communales.
Sa description héraldique est la suivante : " De gueules, au Pampre mouvant de la pointe Tigé et feuillé d'argent, Fruité d'or, au chef aussi d'Or, chargé d'une hure de Sanglier de Sable. Allumée et défendue de Gueules. "
A partir de cette époque, Groslay vit sa population croître rapidement, et passer à 1 000 habitants. L'épopée Napoléonienne marqua beaucoup les esprits, car à la fin du 19ème siècle et même encore plus tard, il n'était pas rare de rencontrer le prénom de Napoléon donné à des enfants.
En 1815, les campagnes napoléoniennes se terminèrent dans la débâcle que l'on connaît et Groslay se trouva occupé par des troupes hollandaises et prussiennes.
Le calme revenu, ainsi que la monarchie, le Groslaysien n'aspirait qu'à vivre en paix, de son travail, mais un autre empereur surgit et avec lui une nouvelle guerre qui se termina en 1870 par la défaite de nos troupes et l'invasion du pays par les troupes prussiennes. La France dût payer une somme astronomique en or pour voir l'occupant s'en retourner chez lui, il conserva quand même deux provinces (l'Alsace et la Lorraine).
Notre commune subit les pillages de l'occupant, certains mirent leurs biens en sécurité en les enterrant dans les jardins, mais c'était l'hiver. Au printemps, l'occupant eut beau jeu de repérer les affaissements qui s'étaient produits lors du tassement de la terre et quelques " cachettes " furent découvertes.
Les hostilités s'estompèrent jusqu'en 1914 où les malheurs de la guerre s'abattirent à nouveau sur nos ancêtres. Groslay comptait en 1911, 2014 habitants. Peu de familles échappèrent à la perte d'un être cher, mais la paix revenue tout le monde reprit les travaux des champs. A l'inverse de certains villages français, la population n'avait pas chuté (recensement de 1921 : 2 527 habitants) car les disparus furent remplacés par les gens venant du Nord de la France et même de Belgique qui, à l'exode, avaient tout perdu et préférèrent refaire leur vie dans notre région.
A cette époque, la vigne avait disparu dans sa quasi-totalité à Groslay ainsi que dans toute l'Europe, à la suite d'une terrible maladie : le phylloxéra. Nos braves vignerons troquèrent alors tonneaux et pressoirs et plantèrent pommiers, poiriers, cerisiers, fraisiers ainsi que tout ce qui est appelé le maraîchage (carottes, poireaux, choux, salades etc.). La proximité de la Capitale assurait de vendre tous ces produits.
En 1930, la population avait cru rapidement pour atteindre 3 050 habitants. Le deuxième conflit mondial vit encore revenir l'occupant allemand pour quatre ans, là encore des heures dramatiques s'écoulèrent au sablier universel, des compatriotes entrèrent en lutte armée contre l'occupant, il y eut des déportations, des fusillés, de pauvres gens abattus en pleine rue. La paix revenue, notre commune poursuivit son expansion pour atteindre en 1953, 4 100 habitants.
Groslay est maintenant un gros bourg, qui affiche fièrement ses origines paysannes, malgré la proximité de la Capitale (15 km). Les gares de TGV de Paris, l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle font que nous sommes à une poignée d'heures des grandes capitales européennes, l'agriculture disparaît au profit de jardins d'agrément, de parcs paysagers.
Le monde évolue, Groslay aussi, mais en luttant pour conserver son écrin de verdure pour la plus grande joie des petits et des grands.
L'Eglise de Groslay
Vocable : Saint Martin Superficie : 836 m2
Orientation : Est (Chœur et abside) Ouest
Classé monument historique le 9 décembre 1929
Du IXe au XIIe : Présence d'un lieu de culte dont il ne subsiste aucune trace visible.
XIIIe siècle : Construction des cinq dernières travées de la nef, d'une partie du bas côté sud et du clocher ainsi que l'atteste la découverte, lors de travaux, d'une médaille à l'effigie du Roi Louis VIII (1223-1226).
XVIe siècle : Agrandissement de l'édifice commandé par Guillaume de Montmorency, puis son fils Anne le Grand Connétable de 1520 à 1542 : chœur, abside, bas côté sud, puis bas côté nord. Dans ce dernier on remarque des voûtes à croisées d'ogives, liernes et tiercerons, agrémentés de pendentifs, l'ensemble du plus pur style Renaissance. Sur un arc figurent deux Salamandres, emblème de François 1er. Sur trois colonnes sont peintes armes des Condés, successeurs des Montmorency.
XVIIIe siècle : Vers 1750 adjonction du petit logement au dessus de l'entrée sud, à la base du clocher.
XIXe siècle : A la fin du siècle édification de la sacristie.
L'église renferme six vitraux du XVIe siècle, classés Monuments Historiques le 23 Octobre 1897, ainsi que deux très belles statues, en chêne et en sycomore du XVIIè siècle et plusieurs tableaux dont deux classés.
Notons encore quatre cloches, l'une date de 1769, une autre de 1783 refondue en 1863, elles sont toutes deux classées depuis le 27 avril 1944.
François Collin
L'Armistice de la première Guerre mondiale
En 1918 se terminait le premier grand conflit mondial. Il avait coûté la vie à 8 700 000 humains, aussi bien civils que militaires.
La France, avec ses 1 390 000 morts, sortait libre mais exsangue de ce conflit. Certes, elle avait récupéré l'Alsace et la Lorraine, mais les familles pleuraient toutes des êtres chers broyés dans la tourmente que furent ces quatre années de guerre.
Quatre années dans le froid, dans la boue et l'eau glacée, avec comme seul horizon les explosions des obus et comme seul espoir celui de survivre encore une minute, une heure, un jour. Quatre années à lutter également contre la vermine des tranchées (rats, poux, etc.)
Puis enfin ce fut l'armistice, le retour vers les familles, il fallut réapprendre à vivre, certains avec leurs handicaps (membres coupés, poumons brûlés par les gaz, cécité, etc.). Que de souffrances endurées ! Certaines régions de France ne se remirent jamais du dépeuplement qu'occasionna ce conflit. Les villages de nos campagnes portent encore la trace indélébile de ce conflit. Il suffit de parcourir sur leurs monuments aux morts la liste des hommes tombés au front, pour s'apercevoir que leur nombre surpasse souvent le nombre de la population actuelle.
La 1ere guerre mondiale se déroula à la charnière de deux mondes. Des idées sur le déplacement des troupes datant du siècle passé, mais des moyens technologiques de destruction des temps modernes. Avant que les militaires aient compris cela, l'hécatombe fut générale. L'Allemagne ne fut pas épargnée avec près de 2 millions de morts. Pour elle, du fait d¹être la perdante de ce conflit, la crise fut encore plus dure, la misère de la population plus grande, et déboucha sur un deuxième conflit mondial.
Les temps ont résolument changé grâce à l'impulsion que donnèrent deux chefs de gouvernement à la fin des années 1950 (le Général de Gaulle pour la France, et le Chancelier Adenauer pour l'Allemagne) en vue du rapprochement de nos deux peuples. Que de chemin parcouru depuis ce jour, et que de chemin reste t-il à faire, mais les états d'esprit ont changé et ne doutons pas que le jour est proche où l'union entre les peuples d'Europe sera totale supprimant d'un seul coup toutes les heures sombres de notre passé. Le sacrifice de ces millions de disparus ne fut pas vain, il correspondait à une autre époque à d¹autres idéaux. La leçon pour les générations suivantes fut sans appel : Malgré la barrière de la langue, nous devons apprendre à vivre ensemble et à nous respecter mutuellement . Le 11 Novembre est une journée du souvenir pour tous ces enfants, ces femmes, ces hommes qui disparurent dans cette guerre. De chaque côté du Front, ils ont souffert l'insoutenable, pensons donc à eux et recueillons nous sur le monument aux morts lors de la cérémonie qui a lieu dans le parc de la Mairie.
La Tribune Samedi 9 juin 1917 Groslay - Avant la famine
Il y a quelques jours, dans une conversation en chemin de fer, on disait que nos deux boulangers étaient sur le point de fermer, non pas faute de combustible, car leur fournisseur avait promis de ne pas les laisser manquer, mais faute de farine, ne pouvant plus en obtenir, ni dans le commerce ni à l'Intendance.
Le Maire était sur le point de rendre son écharpe n'obtenant aucune satisfaction de la Préfecture. Enfin une dépêche officielle autorisait de voir quelques moulins des environs, et après une visite, on trouva quelques voitures de farine qu¹il fallut aller chercher par réquisition de transport, ce qui sauva la situation. Espérons qu'en attendant la soudure, nous ne manquerons pas de pain. Pour l'hiver, un stock de bois va être fait par la commune pour suppléer en cas de manque de charbon.
La Tribune - Samedi 23 mars 1918 Groslay
Contre les Gothas - Monsieur le Maire a fait annoncer à son de caisse que la venue des Gothas serait signalée par la sirène de l'usine Magnier-Bédu et la fin de l'alerte sera signalée de même. Une commission municipale est passée dans les maisons pour désigner les caves capables de constituer des abris, et des affiches ont été apposées sur les maisons choisies en indiquant le nombre de personnes que ces caves pouvaient contenir.
La Tribune - Samedi 4 mai 1918 Groslay
Notre commune est une de celles qui ont accueilli le plus de réfugiés : 450 environ - beaucoup plus proportionnellement que Montmorency et Enghien. La plupart sont des gens de la campagne, qui ont trouvé à s'occuper ; ils sont généralement laborieux, tranquilles et ils cultivent presque tous de petits jardins : il n'y a pas beaucoup de terrains incultes à Groslay. La population de Groslay, qui a vu l'ennemi à ses portes en 1914, compatit au malheur de ces pauvres gens, et quand ils repartiront dans leurs régions libérées, on les verra partir avec joie, parce que cela voudra dire que la victoire a couronné le courage de nos poilus, mais avec une nuance de regret car ce sont de braves gens.
En cas de raids aériens, Groslay ne manque pas d'abris : nous en avons 75 qui contiennent 3200 places - presque un mille de plus que nous n'avons d¹habitants. Le vin de Groslay était renommé jadis, nous avons de nombreux vignerons. La vigne n'est plus qu'un souvenir mais les caves restent.
La dernière semaine d'Août 1944 au Pavé d'Enfer
Le “Pavé d'Enfer” ainsi se dénomme, pour les vieux Groslaysiens, le tronçon de la rue de Montmagny compris entre la rue des Glaisières et l'Avenue de la République.
En ce vendredi 25 Août 1944, dès l'aube, en ce lieu, les événements qui se déroulent semblent vouloir justifier pleinement cette appellation.
Des cohortes de militaires allemands, en complète débâcle, fuient la Normandie où le 17 au soir, Von Klüge a donné ordre de repli. En désordre, jeunes, vieux, pour la plupart éclopés, c¹est l'image souvent reproduite, de toute armée en déroute en terre étrangère. Quelques privilégiés ont pu prendre place sur une ambulance hippomobile car celles-ci défilent en nombre impressionnant, chargées de tout le butin raflé en cours de route par les pillards.
Dans l'après-midi, tout près, place de la Gare, un tout jeune lieutenant de la Luftwaffe fait halte avec des fuyards qu¹il a réussi à regrouper. Après s'être restaurés en faisant griller un porcelet dans la cour des marchandises, ils reprennent leur route, non sans se servir en tabac chez le buraliste voisin. L¹officier (grade oblige) est assis au volant d¹une Simca 5 ... tirée par un cheval.
Depuis plusieurs jours, aucun train ne circule mais le téléphone fonctionne, lui, il permet d¹être relié à Paris dont les dernières nouvelles nous parviennent : c¹est la liesse ! Le Général de Gaulle vient de descendre, à pied, les Champs Elysées, acclamé par la foule.
A Groslay, à 16 heures, la Mairie est occupée par le Comité Local de Libération qui, pacifiquement, a démis de leurs fonctions le Maire et ses deux adjoints. De nombreux Conseillers Municipaux en exercice figurent dans ce comité.
Et la nuit passe au Pavé d¹Enfer, troublée de temps à autre par de lointaines détonations.
Samedi 26 Août 1944, jusqu'à 11 heures, la matinée s'écoule dans le calme, peu ou pas de circulation, le silence. Soudain éclatent des coups de feu tirés par diverses armes : les F.F.I. du groupe G... viennent de déterrer une caisse enfouie derrière le local de l¹Etoile Groslaysienne, au bout du stade Jules Noël, ils s¹assurent du bon fonctionnement de son contenu.
Vers 14 heures, François C...., Groslaysien d'origine polonaise, bavarde avec les riverains des n° 6 et 8 de la rue. Une patrouille de deux soldats allemands, le Mauser à l¹épaule et une grenade à manche dans la botte droite, apparaît. François, qui baragouine un peu d¹allemand, les informe que les coups de feu entendus proviennent de résistants qui sont tout proches. Les soldats ne demandent pas leur reste et repartent vers Saint Brice.Une heure plus tard arrive un cabriolet Mercédès se dirigeant vers Montmagny : à son bord le chauffeur, un Feldwebel et trois soldats. La voiture roule au pas, ses occupants sont aux aguets, le doigt sur la détente, ils passent ... 15 h 30, les F.F.I. se séparent car à 16 heures le Comité de Libération doit rencontrer, en Mairie, les boulangers et les nourrisseurs afin d¹organiser les distributions de pain et de lait. C¹est alors que débouchent du sentier du Champ St Denis trois jeunes : Pierre L..., Roger P...et Rémy JANNEAU, précisément à l¹instant où la voiture allemande revient de Montmagny. Prenant peur ils courent afin d¹entrer chercher abri au n° 13, Rémy perd du temps car il ne veut pas abandonner son vélo qu¹il tient à la main.
Le chauffeur du cabriolet accélère puis s'arrête, l'un des soldats descend, met un genou à terre et tire, comme à l'exercice, un seul coup de feu qui atteint le malheureux en lui traversant la tête. Le sous-officier arrose, à la mitraillette, la façade de la maison, le tireur bondit dans la voiture qui se dirige à toute allure vers Saint Brice.
On prévient le Docteur F... qui accourt, après avoir essuyé des coups de feu tirés du pont sur la RN1, bien qu¹il soit porteur d¹un drapeau de la Croix Rouge. Hélas, il ne peut porter aucun secours ! Mais il faut prévenir les parents, ils sont atteints pour la seconde fois, le frère de Rémy, Louis JEANNEAU, a été victime d¹un bombardement en Allemagne où il se trouvait au titre du S.T.O.
Une autre nuit succède à la précédente, dans la même atmosphère, avec les mêmes bruits lointains.
Dimanche 27 Août 1944 : le calme et le beau temps qui règnent, après le déjeuner, font songer à l¹heure de la sieste dans le midi.
Puis, simultanément, un grondement sourd et des coups de feu : c'est l'arrivée de trois chars marqués de l¹étoile américaine et d¹un emblème inconnu que nous découvrons, celui de la 2ème D.B. Il s¹agit d¹un élément du groupe LANGLADE qui, après avoir contrôlé l'ouest de Paris lors de son avance, stationne en position avancée à Villetanneuse où les F.F.I. sont allés les chercher.
Suivent des half-tracks montés, ainsi que les chars par des soldats du 1er Régiment de Spahis Marocains et par ceux du 1er Régiment Blindé de fusiliers Marins. Les chars s'immobilisent à l'entrée de la rue des Glaisières, ils orientent leur tir en direction de la gare où les F.F.I. sont aux prises avec des allemands. Ce combat : une victime dans chaque camp, chez nous: Paul PHILIPPON.
Pendant ce temps, une poignée de grenadiers allemands dissimulés derrière les arbres situés à l¹entrée des Glaisières, tente d¹attaquer à revers les chars. Alertés par les voisins, les français les mettent en fuite.
Carrefour RN1 avenue de la République est arrivé un char Tigre allemand, il engage, par-dessus les maisons, un duel d¹artillerie avec les français; l¹un des Shermann de la 2ème D.B. avance jusqu¹au passage à niveau et détruit le Tigre au deuxième coup de canon.
Fusiliers marins et spahis progressent dans Groslay, le Curé fait sonner la cloche et monte arborer un drapeau au faîte du clocher. Aussitôt les allemands, depuis la Haie des Champs au-dessus des carrières, font encore des victimes en tirant au jugé sur l¹agglomération. Le soir venu, au grand dam des Groslaysiens, la 2ème D.B. regagne son cantonnement à Villetanneuse.
Lundi 28 Août 1944 : les soldats reviennent en patrouille, nous découvrons les jeeps, les téléphones à dos (talkie-walkie) et quantité d¹autres éléments d¹une armée suréquipée. En raison des événements de la veille, le Comité de Libération se réunit, dès le matin, en Mairie, la farine et la levure manquent, la ration de pain est fixée à 200 grammes par jour.
Mardi 29 Août 1944: dernière nouvelle, presque sans bruit, cette nuit, le pont sur la RN1 a sauté.
A pied, en jeep, des patrouilles plus fréquentes que la veille circulent et nous mettent en garde : des éléments de la Wermacht se cachent dans la forêt de Montmorency, en lisière de Saint Brice et Piscop.
Les commerçants et producteurs de fruits et légumes se voient interdire, par le Comité de Libération, de vendre plus de 10 kg de marchandises par personne étrangère à Groslay.
A 20 heures, comme les soirs précédents, les patrouilles se replient vers Villetanneuse, à 21 heures 30, brusquement notre Pavé d'Enfer est envahi, noir de monde. Un groupe de Saint-Brice nous alerte : les allemands reviennent en nombre, ils raflent tous les hommes. Le temps d'enfiler un vêtement à la hâte et tous les sujets masculins emboîtent le pas, accompagnés de quelques femmes et enfants. Traversée de Montmagny en direction de Villetanneuse où les soldats nous stoppent.
En moins d'une heure, la commune met à notre disposition des salles de classe et des bottes de paille pour ceux qui veulent s'allonger.
Mercredi 30 Août 1944 : 6 heures 30, distribution de bouillon chaud (genre Kub) puis l'on nous prie gentiment de rentrer chez nous. Des officiers viennent rassurer les « réfugiés d'une nuit » affirmant que tout danger est écarté : ils attendent des renforts.
C'est vrai, de retour à Groslay, nous arrivons pour assister au défilé des G.I. de la 28ème division d¹infanterie U.S., 101e régiment avenue de la République ; leur itinéraire a été détourné par le PN 6, le pont sur la RN1 n¹existant plus. Jour et nuit, durant 48 heures, ce cortège s'écoulera, les hommes sur les côtés de la rue, les véhicules, au milieu. Les chars de la 5e Division blindée U.S. passent eux, par la RN16. Cette fois c¹est bien fini !
Jeudi 31 Août 1944: Tout Groslay se réunit pour célébrer les obsèques des victimes, F.F.I. et civils ... les règlements de compte peuvent maintenant commencer ...
François Collin
Le Château Vieux 25, rue de Montmorency
La première mention d'une construction en ce lieu remonte au 27 Avril 1677, lorsque Marie Fayet hérite ... “et des maison, terres et seigneurie de divers fiefs à Groslay...” au décès de son frère Louis, comte de Serris et seigneur de Piscop (archives des Montmorency).
Le 8 Mai 1713, Marie Madeleine d'Albon, veuve de Bénigne Le Rageois, seigneur de Bretonvilliers, achète la propriété, y joint quelques petits fiefs ; lorsqu'elle rend aveu au prince de Condé, en 1714, elle est appelée « Dame de Groslay ». C'est cette Dame qui obtient un arrêt du Conseil du Roy, le 19 Octobre 1724, rétablissant les franchises accordées aux habitants de Groslay pour la vente de leurs produits à St-Denis. Ces franchises avaient été acquises par Dame Richilde de Groslay en 1190 et n'étaient plus reconnues par les moines de St-Denis. D'ailleurs, Jean Pastourel, seigneur de nombreux fiefs, s'était déjà trouvé dans l'obligation de leur intenter un procès, en 1378, pour la même raison. ( Les franchises étaient des exemptions ou exonérations de taxes perçues par les moines de St-Denis sur les marchandises vendues au marché.)
Jacques Simonnet, marchand et bourgeois à Paris, devient propriétaire le 21 Mai 1720, il agrandit encore le domaine par l'achat de quelques petits fiefs voisins.
Arrive ensuite Jean François de Ficte de Soucy, seigneur de Soucy et de Quincampoix qui s'y installe le 8 Octobre 1740. Six ans plus tard un litige s'élève avec Monsieur Lalive de Bellegarde, propriétaire du Château de la Chevrette à Deuil, au sujet du titre de « Seigneur de Groslay » que tous deux veulent porter ; Monsieur de Bellegarde prétend qu'il a hérité de ce titre en qualité de successeur de Monsieur de Machault à Deuil. Monsieur de Machault s¹arrogeait ce droit car il avait acquis des terres au prince de Condé en 1641. Le prince met tout le monde d¹accord : le 1er Juin 1648 il arrête qu¹il n¹y a à Groslay qu¹un seul seigneur, c¹est lui, les autres ne sont seigneurs que des fiefs dont ils lui rendent hommage. 17 Novembre 1752, Monsieur de Soucy et Marie Angé.
Lieux-Dits et Sobriquets
Imaginons-nous il y a environ 60 ans, la population de Groslay régresse un peu après une spectaculaire envolée. En effet, entre 1926 (3050 ha) et 1929 (4001 ha), presque 31 % d'augmentation de population en cinq ans, bref nous sommes encore presque 3650.
La vie locale est bien différente de ce que nous connaissons et notre village est un peu ignoré au-delà de 10 kms à la ronde. Si par hasard vous manquez le " Train des théâtres ", à 0 h 38 à la Gare du Nord, et que vous demandez à un taxi de vous amener à Groslay, c'est un peu comme si vous lui parliez de Trifouillis les Oies, il faut bien 5 minutes d'explications pour qu'il nous situe.
Les habitants se classent en quelques catégories : des employés (beaucoup au Chemin de Fer), des ouvriers (notamment l'usine de charrues Magnier-Bédu), mais encore pas mal d'agriculteurs, ainsi que ceux qui, directement ou indirectement travaillent avec ou pour eux.
La Commune, comme partout, est divisée en terroirs ayant chacun un nom pour le désigner (voir les actes de notaires ou les projets d'urbanisme) : le Village, les Coutures, les Hérondeaux, les Paradis, etc. Ces appellations ont toujours valeur actuellement, même dans les actes administratifs.
Par contre certains endroits n'ont pas de dénomination officielle et ne sont cités que par de moins en moins de Groslaysiens, les anciens puisqu'il n'y a plus de vieux !
Par exemple la " Croix Marchais " est encore un peu citée, bien que le calvaire qui s'y trouvait ait disparu depuis longtemps (carrefour Mériens, Verdun, Lac Marchais, Jules Vincent et Ferdinand Berthoud). Et le " Pavé d'Enfer " vous connaissez ? Il se situe rue de Montmagny, entre l'avenue de la République et la rue des Glaisières, pour quoi cette expression ? Dans des temps anciens il y eut des droits de passage, ensuite, lorsque l'on refit le pavage, en haut de la rue, des n° 1 à 11, les pavés furent, tout exprès, posés très inégalement pour secouer les roues des charrettes et tombereaux qui sortaient des Glaisières, chargés d'une boue tenace (de l'argile verte ou de la glaise jaune).
Plus bas, en suivant la rue de Montmagny, à gauche se trouve la ruelle de la Saussaye, limitrophe de Montmagny, or côté Groslay, à l'angle des deux voies, existait un grand mur disparu aujourd'hui, confectionné avec les démolitions d'Haussman à Paris : c'était le " Mur à Grandjean " du nom de son propriétaire.
Suivons la ruelle de la Saussaye, elle nous mène à la Nationale 1, tournons à droite, subsistent en contre bas quelques arbres, robiniers et autres, c'est ce qui reste du " Bois des Pendus ". Ici pas besoin d'explications.
A la fin du 18ème, début du 19ème, compte tenu de l'accroissement de la circulation (déjà), on refit le pavage de ce que nous appelons la rue d'Enghien, c'est le " Pavé Neuf " où il n'y a plus de pavés !!!
Tout près, rue de Montmorency (autrefois chemin de sable), avant 1861, nous étions chez nos voisins sitôt passé la rue Comartin, à droite, et avant la rue des Blots, à gauche ; cet ancien hameau a nom 'La Rue " depuis des siècles, mais en langage groslaysien la prononciation peut difficilement s'écrire, disons Lââââ Rue, en articulant le " La " un ton plus bas que " Rue ", le plus grave possible.
Un autre petit bois, dont il subsiste quelques arbres sur Montmorency, au bas de la rue Billaut, était beaucoup plus important au temps àù ce Monsieur habitait chez nous, d'où le nom de " Bois Billaut " son propriétaire.
Allons à l'autre bout du pays, en haut de la rue Carnot, Monsieur Magnier-Bédu construit, dans le premier tiers du siècle un immeublede cinq étages, il est immédiatement appelé la " Maison Magnier " et par les méchants " La Caserne ". Un peu plus tôt Monsieur Landry, exploitant des carrières de St-Brice (et Groslay), avait fait construire, vers le 130 rue des Carrières, un bâtiment à usage de logements et de magasin pour ses ouvriers, en majorité d'origine italienne, c'est la " Cantine " dont le nom servira à désigner le quartier. On n'emprunte pas la rue des Ouches, on passe " Par les Derrières ".
Il n'y a pas si longtemps, au mois de Juillet, la Fête Foraine d'été s'installait Place de la Libération, jadis à " L'Allée " rappel d'une superbe allée d'ormes montant vers l'ancienne mairie.
Parlons à présent des surnoms ou " sobriquets ", ce n'est pas une exclusivité locale mais nous rappelle qu'il n'y a pas si longtemps (en 1936) nous étions vraiment à la campagne, avec ses coutumes. D'ailleurs beaucoup de nos noms de famille sont tirés de surnoms : Legrand, Legros, Petit, Maisonneuve, Dubois ..... nous n'en finirions pas !
Nous avons la " Marie Poisson " qui vient de Montmorency vendre ..... vous devinez quoi (l'été on la suit à l'odeur), et puis la " Coquette " qui, avec sa brouette, chargée de légumes plus ou moins frais, arrive de Sarcelles (dont nous appelons les habitants les " Gueules Mortes ". C'est son chapeau fleuri qui lui vaut son surnom.
Ici, tel cultivateur toujours pressé est appelé l' "électrique " ou " Court Toujours ", tout près de chez lui habitent " Prince " et son frère " Frère ". On connaît également " Le Rouge " en raison du teint de son visage et " La Groseille " à cause d'une histoire de fruits de ce nom et de sa couleur politique.
Ces surnoms sont généralement utilisés à la suite du nom de famille car, dans certains cas, les patronymes sont précédés du même prénom. Ainsi le personnage est immédiatement fixé : " Patate ", " Caparaçon ", " Cyclône ", " L'Pisseux ", " Peine à Jouïr " et autres appellations que la décence ne permet pas de citer.
Tout ceci n'est qu'une continuation, la génération précédente n'était pas plus tendre, on y trouvait " Le curé de La Rue " ainsi que " Le Maire de La Rue " et aussi " Queue de Lapin " de même que " Le Diable ", etc.
Les sobriquets sont maintenant oubliés, ou presque, ce n'est sans doute pas plus mal, certains étaient vraiment lourds à porter.
François Collin
Une maison disparue : Comartin ou chez les demoiselles Rambaud
Rue Comartin, vous connaissez ? Oui bien sûr, la petite rue, presque encore un chemin, qui joint la rue de Montmorency à celles du Boÿs et du Champ d'Asile, avant de devenir le Grand sentier. C'était la ruelle Roger, elle changera de nom en 1862, pour honorer deux anciens maires, le père et le fils, et ce durant le mandat du petit-fils.
Remontons un peu le temps, nous sommes en 1670, le curé de Groslay est François LE FEBURE, bachelier en théologie, il décide de construire un nouveau presbytère.
Il l'élève sur un terrain proche de l'église, faisant partie du fief du Rocher et appartenant à la paroisse. C'est une belle maison avec côté rue de Montmorency un perron de quelques marches devant presque toute la façade, donnant sur une cour pavée au n° 4 de la rue. Des communs qui seront profondément modifiés par la suite se trouvent aux 6, 8 et 10 ainsi que des jardins. Ceux-ci font retour derrière cette grande maison, jouxtant ce qui est aujourd'hui la Clinique Sainte Marie.
Il y a une autre entrée sur ces jardins, au fond à gauche de la cour du Rocher, l'Abbé LE FEBURE ayant obtenu, le 15 Juin 1672, de Dame Françoise CADEAU veuve de Philippe GERVAIS, Conseiller Echevin de la ville de Paris, " droit de passage tant à pied qu'à cheval et pour carrosses, harnois et bêtes de somme "dans l'allée plantée d'arbres de la Cour du Rocher. Cette allée appartient toujours au propriétaire de la clinique et l'occupant de l'ancien presbytère a toujours droit de passage depuis 325 ans.
C'est dans ce presbytère que, 85 ans plus tard Jean-Jacques ROUSSEAU, lors de son séjour à l'Ermitage, vient rendre visite, de temps à autre, à l'Abbé MALTOR, ainsi qu'il le mentionne dans ses " Confessions ". S'il n'avait fui la France, Jean-Jacques, aurait pu en 1767, y retrouver l'Abbé MARTIN, successeur de MALTOR, qu'il connaissait bien comme ancien curé de DEUIL avant GROSLAY ; tous deux fréquentaient le château de la Chevrette, Mme d'EPINAY la propriétaire et son salon de gens célèbres, GRIMM, DIDEROT, CARMONTEL, etc.
Arrive la Révolution, les biens du Clergé sont saisis et vendus comme " Biens Nationaux ", le presbytère est acheté, le 2 Fructidor An IV (1796), par Pierre François COMARTIN, Syndic des huissiers auprès du Tribunal Civil de la Seine, pour un montant de 9540 livres.
Quinze ans passent, en 1811, M. COMARTIN devient Maire de GROSLAY, il le reste jusqu'à son décès en 1816. C'est son fils, Pierre Joseph, qui lui succède, c'est un lettré, il est Vice Président de l'Athénée Royal, en même temps il dirige à PARIS un très important négoce que l'on appellerait de nos jours commission importation. Il envisage un moment de lancer une opération de pêche à la baleine, il reste notre premier édile pendant trente ans, jusqu'en 1846.
Beaucoup de changements interviennent durant ce long mandat, les énumérer serait fastidieux, mais c'est toujours dans le sens du progrès. En remerciement, la commune l'honorera en débaptisant la ruelle Roger qui devient la rue Comartin, le 18 Juin 1862.
P.J. COMARTIN a deux fils Jules Pierre Ignace et Octave, ce dernier, en 1857, est nommé Maire à son tour, en remplacement de M; De La Chaussée qui ne peut plus remplir son office en raison de ses infirmités.
Les deux frères, en 1850, effectuent d'importants travaux dans leur maison, ils la surélèvent ajoutant un étage et à peu près au n° 10, font construire une tour de style moyenâgeux, avec porte cloutée, grille, herse, au-dessus de celles-ci un décor de heaume, bouclier et gantelets, on l'appellera dans le pays " La Maison du Chevalier ". Une autre tour est dressée, de style néogothique, elle, à l'angle de la maison et d'un bâtiment à usage de chapelle.
Avant d'achever son mandat, en 1865, Octave publie la première histoire de GROSLAY, rédigée durant les loisirs que lui accordent ses obligations municipales et sa charge d'avoué à PARIS; en épigraphe il écrit ces quelques mots " Apprenons d'abord l'histoire de notre pays ".
A son décès, il laisse deux legs permettant d'attribuer des prix qui portent son nom, l'un récompense scolaire, l'autre récompense historique, ils sont, hélas tombés en désuétude et ne sont plus décernés.
Lors de leur disparition les deux deux frères ne laissent que des filles, dont une, Marie, épouse Alphonse LASSON qui aux dires des uns est maître de forges et pour les autres directeur de prison. Lui aussi sera notre Maire, durant l'année 1878, il marie l'une de ses filles à Camille DENOYEL, secrétaire en chef de la rédaction du journal Le Monde.
Lucien RAMBAUD se marie avec une autre demoiselle Caroline COMARTIN, ils auront un fils, Louis et trois filles ; Louis sera le père de jeunes filles qui, bien que résidant avenue Matignon à PARIS, continueront à fréquenter, l'été, la maison de famille de GROSLAY. C'est ainsi que la Maison COMARTIN est devenue la " Maison des Demoiselles RAMBAUD ".
Ces personnes possèdent une petite voiture, tirée par un âne, pour se promener dans le voisinage et, croyez-moi être âne chez les demoiselles RAMBAUD est ce que l'on appelle une sinécure.
La dernière demoiselle disparaît en 1961, en raison du nombre de copropriétaires, compte tenu également des droits de succession élevés des héritiers éloignés, la famille vend la maison à M. Yves COSTES. Celui-ci, à la vue des travaux qu'il faudrait effectuer décide, en 1962, de raser tous les vieux édifices et d'en construire un nouveau, celui que nous apercevons aujourd'hui derrière un rideau d'arbres.
Cette maison était restée 165 ans dans la même famille, record pour les " Maisons Bourgeoises de GROSLAY ", elle avait abrité, autre record, 4 Maires, tous de la même famille, totalisant presque 45 ans de mandat.
Ceux qui ont 40 ans ou plus, et qui passent à cet endroit avec des enfants ou petits enfants, des amis ou des parents ont, parfois un souvenir et une réflexion... "Tu vois, là, c'était la Maison des Demoiselles RAMBAUD ".
François Collin